Du jour au lendemain, il était devenu comme un amant de
passage. D'avoir perdu son emploi, son univers semblait s'être écroulé. Il n'y
avait plus place en lui pour elle et sa fille. leur fille, Lana. Plus impliqué
dans rien, absent à lui autant qu'à elle et à Lana. Puis, comme peut se le
permettre un amant de passage, il avait refermé la porte, un matin, sur son dos
tourné à leur avenir commun.
Elle n'avait plus de travail depuis dix ans qu'ils vivaient
ensemble. Elle lui avait tout consacré, avant même l'arrivée du bébé.
Quand elle fut à peu près certaine qu'il ne reviendrait
plus, elle rédigea un CV, se rendit à l'ANPE, répondit aux petites annonces des
journaux. Rien !
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L'hiver s'annonçait par des ciels de bourre grise et un
crachin tenace. L'appartement gardait son petit air douillet, et elle parvenait
à cacher ses angoisses à Lana. Personne ne voulait d'elle, ses réserves
s'amenuisaient, et lui demeurait introuvable.
Un soir, hébétée par une journée de recherche infructueuse,
frissonnant dans son léger manteau gris, bien mal choisi pour cette
température, elle s'abrita dans une encoignure. Soudain, une voix féminine
murmura à son oreille :
- Tenez, mon petit, ça vous fera toujours un café pour vous
réchauffer.
Une pièce de deux euros, froide au toucher, mais brûlante de
sa honte, luisait dans sa main crispée. La femme avait tourné le coin de la
rue. Impossible de la rattraper.
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