Depuis qu'elle le connaissait, il n'avait que ce nom à la
bouche : Le Touquet. Il le prononçait comme on suce un bonbon, les lèvres
doucement arrondies s'évasant, gourmandes, sur la finale qu'il laissait
traîner, les yeux pétillant de réminiscences enjouées.
Il lui racontait ses visites d'enfant entre
ville sage et le Paris-Plage des badauds, le choc de deux cultures, les regards
amusés ou acerbes des uns sur le laisser-aller vestimentaire des autres, leur
vacarme, leur désinvolture.
Ses mots dessinaient à grands traits les
routes à l'asphalte rosée, les villas égrenées dans leurs parcs secrets, la
pinède et ses molles allées crissant de sable et aiguilles mêlées. Il
détaillait l'extraordinaire centre équestre, le merveilleux hôtel de ville, le
superbe casino dans son écrin verdoyant. Elle riait de tels abus de langage, de
cette redondance.
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- Et la mer ? demandait-elle.
Parle-moi de la mer.
Il décrivait alors sa mouvance colorée tout
au long de la plage et à perte de vue, ses douceurs entrecoupées de brèves
colères ; mousses échevelées chevauchant les crêtes, aplats de bleus et
verts sombres impénétrables et mystérieux, danses d'ocres sablonneux.
- Elle est changeante et
capricieuse comme une belle femme, disait-il en effleurant sa tempe d'un doigt
rêveur. Elle est miroir du ciel qui, chaque soir, offre un festival de nuances.
Il y a des violets hurlants dans des rouges de brasier ou des laitances rosées,
moirées, nacrées, qui se répercutent en mille éclats de lumière dans les
petites mers qu'elle abandonne dans les creux de sable qu'elle a gravés
patiemment au fil du jour. Parfois, au crépuscule, elle s'immobilise et se noie
dans son frère le ciel. Après avoir digéré le soleil, elle devient translucide
et opalescente.
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