La première chose que je vis, en
entrant dans la salle comble, fut son imper. Il s'agissait d'un vêtement de
bonne coupe, de couleur mastic. Cela sentait le faiseur de grand luxe jusque
dans la moindre surpiqûre.
L'homme qui portait cet
imperméable élégant me tournait le dos. Bien que mêlé aux nombreux invités du
vernissage, sa silhouette s'en détachait. Il possédait une carrure agréable, de
celles qui laissent deviner un torse bâti en triangle harmonieux. Au-dessus du
col confortable, sa nuque émergeait, droite, solide, dépourvue de ce défaut
commun à tant d'hommes, un aspect massif, trapu. J'accorde beaucoup
d'importance à la nuque des individus de sexe mâle. C'est un de mes premiers
repères. L'homme à l'imperméable me l'offrait impudiquement à contempler et je
la savourai.
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La nuque des femmes ne trahit
pas leur tempérament. D'ailleurs, elle est trop souvent dissimulée par une
masse chevelue pour qu'on puisse y lire quoi que ce soit d'intéressant sur leur
propriétaire. Chez l'homme, elle dénonce bestialité ou raffinement. Celle-ci me
sembla fort plaisante. Glabre en sa base, elle ne laissait apparaître qu'un fin
duvet mordoré, naturel, et non fruit d'une repousse engagée suite à un rasage
de circonstance. Succédait à ce friselis tentant, un v bien symétrique,
s'évasant en mèches soyeuses qui habillaient un crâne, dont l'ovale distingué
se différenciait autant de l'arrondi commun que du pain de sucre risible.
Un balayage vers le bas de
l'imper dévoila deux jambes de pantalon chutant souplement sur des talons de
cuir aussi soignés que l'ensemble du personnage.
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